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Elhadra entâana, les mots en CHE, TCHE, nous donnent une identité particulière. A vos plumes pour nous mettre dans le bain de ce dialecte.
le 21/08/2003
DIALECTE DE GHAZAOUET quelques éléments de réponse (par Mohammed Hamdoun)
Ghazaouet, située à une quarantaine de kilomètres de la frontière algéro-marocaine et à quelques milles nautiques d’Almeria a connu un brassage linguistique très riche au cours de son histoire. Elle a un fond de population arabophone ou plutôt arabisé car la présence des traits berbères dans cette région est très marquante et même visible. Il suffit d’aller dans l’arrière pays des Traras à Beni Khalled ou Sidna Youchâa, par exemple, pour constater des personnes au teint blond et aux yeux verts. (On pourrait avoir des "Miss World" de cette région !)
Ghazaouet, comme tout le littoral algérien, a connu respectivement sept grandes invasions : phénicienne, romaine, vandale, byzantine, arabe, ottomane, et européenne.
La conquête arabe de l’Algérie et Ghazaouet n’échappe pas à la règle, s’est réalisée avec des combattants mercenaires Iraniens, Mésopotamiens, Syriens, palestiniens, jordaniens, etc., mais avec bien peu d’Arabie, que ce soit celle du Hedjaz ou celle du Yémen.
Quid alors de cette « origine arabe » tant revendiquée par certains, niées par d’autres et quasi décrétée par les administrations ? Carrefour de civilisation, méditerranéenne et africaine tant par sa géographies que dans ses parcours et échanges, plaque tournante entre le Maroc et l’Europe, flux et reflux de l’Espagne andalouse, cette enclave qu’est est Ghazaouet est demeurée le pays des Berbères et des Arabes – et ce, quelle que fut l’écriture en usage, du Romain à l’Arabe, du Turc au Français- sans pour autant échapper –heureusement !- aux brassages génétiques et aux apports culturels de toutes sortes.
L’idée même de populations échappant à ces dynamiques, au prétexte de leurs habitats montagnards, est une vue de l’esprit lorsque l’on souvient des déplacements et cantonnements systématiques des tribus par l’administration française, quand ce n’était pas l’interdiction ou l’obligation de demeurer en une portion du territoire par elle spécifiée.
Aux fonds dialectaux arabe et berbère sont venus s’ajouter depuis le début du XXème siècle des apports des langues italienne, espagnole et française. Le parler ghazaoueti (ou ghazaoui, pour faire plaisir à Samy) s’est enrichi de mots empruntés respectivement à ces langues, particulièrement dans le domaine maritime et halieutique, non seulement du fait du legs linguistique colonial, mais aussi à cause de la fréquence des relations des habitants de Ghazaouet avec l’Espagne et la France en particulier.
Le parler de Ghazaouet soumet les emprunts espagnols et français à son système phonétique pour les adapter, de façon que les termes subissent des transformations de leur contenu en consonnes et en voyelles. Le locuteur gahzaoueti, quand il utilise un mot français, l’arabise allant jusqu’à le conjuguer si c’est un verbe ou l’accorder si c’est un nom : par exemple « i comandiw » (ils commandent), « i controliw » (ils contrôlent), « pasporates » (passeports),
« martoyates » (marteaux). L’emprunt domine surtout dans le lexique de la technologie, des produits industriels et des activités modernes.
Le parler de Ghazaouet n’a pas emprunté uniquement aux langues latines. L’affinité entre le parler du Rif marocain (Berbère) dominé par un champs lexical rural et « terrien » est très marquante, comme dans l’agriculture et la poterie (ajeddou = la jarre, agholal= escargot, amalous =suie…). La frontière géographique et (même politique) entre le Maroc et l’Algérie ne coïncide pas avec une frontière linguistique.
A noter aussi la survivance le l’usage dans la région de Ghazaouet, de certains mots turcs dont l’introduction date de la période de la régence ottomane d’Alger et de l’occupation éphémère de Ghazaouet par les Turcs. Dans ce sens, outre les termes dont l’emploi s’est généralisé dans l’ensemble de l’Algérie, tels que : « pacha », prononcé localement « Bacha » (gouverneur de province), « diwan » (conseil du sultan ottoman), « chaouch » (huissier)…on peut citer des mots turcs usités de nos jours dans le thème des professions libérales et artisanales : « khaznadji » : agent du trésor public, « beylik » : domaine public…. Parfois, il s’agit de mots arabes qui sont turquisés par suffixation « dji », par exemple : « qahouadji » : cafetier, « sfandji » : marchands de beignets, « souaâdji » : horloger, « zlaïdji » : carreleur…
Les pénétrations linguistiques dans la région de Ghazaouet et comme partout ailleurs sont nos jours véhiculées à domicile par les médias étrangers, en particulier la télévision parabolique…et récemment la toile (Internet).
Quelques mots d’origine anglo-saxonne (globalisation oblige !) font maintenant partie du dialecte de Ghazaouet ex : week-end, penalty (foot) ; et quelques mots réservés à l’informatique et l’internet : chat, (discussion amicale). On a formé de ce mot là le verbe « chatter » avec une terminaison du premier groupe des verbes français et par la suite on l’arabise comme dans l’expression « chatter maâh » : discuter avec lui.
Ghazaouet et sa région, donc, se distingue par un patrimoine culturel et linguistique particulier, enrichi par les apports extérieurs. Alors que l’héritage de l’ère coloniale et le courant migratoire contemporain ont été à l’origine de pénétrations culturelles européennes, la situation géographique de Ghazaouet a permis l’infiltration de nombreux apports à partir de la France, l’Espagne, l’Italie et bien sûr du Maroc. Cette région frontalière s’avère finalement un carrefour d’influences étrangères diverses, rappelant l’expression de F. BRAUDEL : « Les civilisations se font sur les frontières. »
Et pour finir, je résume la situation linguistique de Ghazaouet et de sa région dans l’équation « linguistique » suivante :
DG = -I Ar2 Fr Br Es Tr
Clé : DG = Dialècte de Ghazaouet
-I =moins Italien Arabe à la puissance 2 Français Berbère Espagnol Turc
Notre dialecte, donc, est le résultat de brassage de plusieurs langues, un melting-pot linguistique. Et comme on dit à Ghazaouet : « Khaltta ou jaltta, tasfa ! »
Mohammed HAMDOUN
Terminologie des verbes culinaires ghazaouis (par Latifa Salah)
Chers amis,
Voici une série de verbes utilisés en cuisine algérienne,certains sont spécifiques à notre région de Ghazaouet.
-querrate = gratter un citron par exemple
-karrat=couper en tronçons en effilant,se dit pour les haricots verts
-fassass,enlever les gousses des féves par exemple
-kharam=écosser les petits pois ou les haricots à égrener
-beyette=faire passer la nuit dans l'eau,pour les pois chiche par exemple
-ghachi=faire passer la nuit dans l'eau jusqu'à apparition d'une mousse(ghachiya)
-oghraf=se servir généralement d'une louche
-emkhot=barrater
-tarrab=battre(les mêmes lettres sont inversées)
-halhal=roulerla graine de semoule, dans le sens ''ouvrir 2 fois'' les grumeaux agglutinnés
--gharbel=passer au tamis(elghorbal)
-tiyah=tamiser ''faire tomber la farine à travers un tamis''
-nafakh=mouiller la graine de semoule par exemple
-eftel=rouler la graine de semoule pour en faire du couscous, du berkoukess,ou elssen atir(langues d'oiseaux)
-ethane=hacher
-ouareq=abaisser la pâte,littéralement veut dire ''la rendre sous forme de feuille
-derri=saupoudrer
-bakhar=faire cuire à la vapeur(ebkhor:vapeur)
-massar=essorer
-hassar=égoutter
-louwi=rouler (dans des amandes par exemple)
-esslaq=faire bouillir
-chaouat=faire brûler,bouzelouf par exemple
-hassel,plonger dans du miel
-kass=couper
-queb=verser
-edleq=pétrir
-edmeq=pétrir
-hamar=rôtir
-jamar=mijoter(ejmar=braise)
-saki=arroser la semoule de bouillon
-edhene=enduire de beurre
-rach=asperger
-quadere=mettre de l'eau fal ekdra(la marmite)
-rawi=arroser de eroua(bouillon)
-ahjene=pétrir(hajin:pâte)
-gharass=enfoncer (mettre la tête dans le trou),une amande par exemple dans un gâteau
-sadef=ranger,aligner
-haress=casser elez(les amandes)
-chalal=rincer
-lasseq=coller
-eqli=frire
-echwi=griller(les poivrons, les sardines)
-eqleb=retourner
-queb=verser
-hami=réchauffer
-bared=refroidir
-eqssam=diviser
-quass=couper
Ma mémoire en a bien oublié, afin de les sauvegarder (pour notre plaisir personnel et la mémoire de nos enfants),je compte sur vous pour compléter cette liste.
latifa salah
Terminologie des verbes culinaires ghazaouis (suite) (par Khaled Sidhoum)
Quelques verbes, dans ce registre culinaire et domestique, conjugués à la 1ère personne du singulier ou à la forme impersonnelle ou passive.
Ennaki = éplucher
Enssaffi = filtrer
Enlakame = doser le café , thé en préparation
Nerchame = marquer le pain, les gâteaux au marchame
Enkalli , yatekala = faire revenir
Enrabi el khemira = faire la préparation du levain
Khemrate = ça a levé !
Nettrahe = mettre au four
Hamasse = action de mélanger les pois chiche au café avant de le griller et le broyer
Ennerad el k’doure ou nanssabe el k’doue : préparer la marmite et placer les marmites sur l’âtre
Enkachare = éplucher
Endouque = pilonner, broyer, concasser
Entakhtakhe = mettre la pâte, semoule dans un bouillon arrivé à ébullition pour les faire cuire
Enfaïyate = permettre au café arrivé à ébullition de « baisser » et de reprendre à chaud son ébullition
Enneghalli = faire bouillir
Enrequade = conserver
Naloui = plier
Enchaouate = griller la tête du mouton, par exemple
Enntamare ezzitoune : conserver les olives
Enfassal el khroufe = découper les quartiers de l’agneau
Enouijade = préparer
Enmellahe = saler
Enharaque = remuer, touiller
Nadhane essnai, essnaouates = huiler ou beurrer le, les plats
Enhoke : gratter
Namsahe =essuyer
Nenefatte = secouer
Enyabasse = essuyer ou faire sécher
Ennekakhe ala el jamare = souffler sur les braises
Nachaale = allumer
Natfai = éteindre le feu , tremper un gâteau dans le miel en l’y plongeant
Enrayaje ala el aafia= agiter un carton pour donner de l’air à la braise
Ennekhalaa = sécher la viande au soleil, el khaliie
Enssaki = mettre le bouillon sur le couscous
Nahlaje = agiter
Nachoui, nakli, entayabe = faire griller, cuire à la poêle ou dans la marmite
La liste reste encore longue, ce début de terminologies permet à chacune et chacun de ne pas être dépaysé ni fi al tcheusina, ni falmasskhare , ni falaoujake, ni falkanoune... (La cuisine, cuisine rurale, et âtre du cafetier)....
Bon appétit !
Khaled Sidhoum
El harira et les verbes culinaires
(par Latifa Salah)
KHALED,
tes verbes m'ont emportés vers sidna ramadhan,voici un prélude à ce mois sacré:
KASS elham,QUACHAR el khodra,ou RAD elquadra hala elhafiya.
QUADERE ou KISS lemeleh.
Elquadra ebdat ETBAK BAK ouala TAGHLI,matenessch bach ETAKHTAKH.
ARMI elssen atir oua elkossbor DI DOQUIT ouala lakhmira DI RABIT.
ZID ha elmaghirfa del querouia fa etali OUA ETFI elhafiya.
Ebssahtquem lahrira di ebnina ,ramadhan el quarim karreb.
latifa salah
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